Transformation numérique: Les leviers d’accélération
Aujourd’hui, il va falloir aller plus loin, aller plus vite et ratisser le plus large possible. L’ambition industrielle doit s’adapter inévitablement à la révolution numérique. Sauf que cette ambition a des pré-requis qui ne sont pas encore tous réunis. Parmi ces pré-requis, le degré d’appropriation sur le terrain sachant que le paysage économique navigue à plusieurs vitesses. Résultat: des entreprises de services (banques, assurances, tourisme, grande distribution, télécoms…) plutôt avancées face à des entreprises du secteur primaire et secondaire très en retard. L’Institut royal des études stratégiques (IRES) a mené une étude, dans le cadre de l’analyse des mutations structurelles du système mondialisé et des enjeux et défis que celles-ci représentent pour le Maroc. L’étude de l’IRES permet de cerner les principales tendances qui se profilent en matière de digitalisation à l’échelle mondiale et d’examiner le degré de préparation des entreprises et des administrations marocaines à l’ère digitale. Elle décline aussi des propositions, à même d’accélérer la transition digitale du Maroc en vue d’en faire un pilier de l’émergence économique et un axe central de compétitivité. Selon l’étude, le positionnement du Maroc et la maturité des entreprises et des administrations révèlent un déploiement à plusieurs vitesses. Par ailleurs, «le croisement des données des positionnements internationaux du Maroc, pour les usages et la production numériques, met en évidence des situations assez contrastées». C’est le cas notamment au niveau de l’e-gov qui n’est pas complètement opérationnel, le capital humain enregistre de gros déficits et de réelles faiblesses. Plus encore, l’infra-structure numérique reste globalement faible… Ce sont là autant de limites du positionnement du Maroc qui est à reconsidérer par rapport à d’autres actifs immatériels, en particulier ceux relatifs à l’innovation, au développement des compétences ou encore de contenus numériques, analysent les experts de l’IRES.
Autre bémol auprès des grandes entreprises marocaines, le phénomène Big Data est encore marginal en termes d’usages. «Un peu plus de 20% des entreprises ont effectué des analyses de type “données massives”, principalement à partir de données internes ou géolocalisées, ou à partir d’appareils mobiles. Très peu d’entreprises utilisent les données des réseaux sociaux, pourtant extrêmement diffusés au Maroc et aucune n’utilise de données externes autres que celles indiquées». Sur le volet des usages spécifiques, l’essentiel des utilisations mobiles concerne des recherches d’informations et des interactions sociales au sens large: consultation de sites, participation aux réseaux sociaux, téléchargement d’applications mobiles notamment. Les aspects relatifs aux transactions sont très minoritaires, ce qui traduit la faiblesse du e-commerce au Maroc.
Globalement, à travers les benchmarks internationaux, le positionnement du Maroc sur le plan numérique «est en retrait par rapport aux grands champions du numérique, notamment sur les dimensions liées aux business models et aux modèles organisationnels numériques». Or, ces deux critères sont particulièrement importants dans le contexte de la transformation numérique globale, déduit l’Institut royal des études stratégiques.
Sur un tout autre registre, celui de l’indice d’innovation globale, le Maroc se situe au niveau de la Tunisie et du Kenya, mais il est en retrait par rapport à l’Afrique du Sud, la Malaisie et la Turquie. Par ailleurs, l’écart entre indices de TI et indices d’innovation est élevé, «ce qui tend à suggérer qu’un effort est à faire en matière de compléments d’innovation pour tirer avantage du numérique», préconisent les experts de l’IRES.
Sur le prisme de la technologie, autrement dit celui de l’indice d’adoption du numérique, le Maroc se situe entre la République Dominicaine et le Mexique, loin derrière l’Egypte, la Jordanie et derrière l’Afrique du Sud et la Tunisie.
Dans le domaine de l’éducation, il y a encore des gisements d’amélioration au Maroc. De l’avis d’experts, «il faut s’employer prioritairement à développer des facultés cognitives et socio-affectives qui préparent à des carrières plutôt qu’à des emplois précis, étant donné que moins de la moitié des écoliers actuels peut espérer occuper un emploi qui existe aujourd’hui».
Les pouvoirs publics sont aussi appelés à renforcer les outils d’administration électronique à l’instar des cartes d’identité numériques, des systèmes de gestion financière ou des cyberservices pour les citoyens et les entreprises, tout en modifiant les incitations offertes aux prestataires et en améliorant les performances, déduit l’étude de l’IRES.